Essai d'oublier

•• Date d'inscription : 18/12/2010

Essai d'oublier

Je me rappelais ce moment fort, ce moment choquant pour une enfant qui n'avait que sept ans et quelques mois.

Mon père est parti quand je n'avais que deux ans, mes souvenirs de cette époque restent confus, je n'ai pu comprendre ce qui arrivait, ce qui se passait. Papa n'était plus là et je n'avais pas le droit d'aller dans sa maison tant que je ne savais pas nager. Ma sœur, y allait un week-end sur deux. J'entends encore ses pleures quant elle revenait. Ses mots que j'écoutais en collant mon oreille contre son mur. J'ai passé cinq longues années dans le brouillard et en état d'incompréhension totale. Mais il revint, lors de mes sept ans.

On allait passer nos vacances dans notre appartement secondaire en Suisse. Les toiles d'araignées s'installaient à chaque fois que nous partions . Cet endroit possède tellement de souvenirs ! En hiver, ma sœur et moi nous installions toutes les deux devant la fenêtre. Blottit dans nos couvertures, nous regardions le balcons se remplir de neige, le lampadaire illuminait chaque flocon. Le froid rentrait pas le joint en dessous de cette glace transparente, il nous congelait les pieds.
Mais ce n'est pas ce souvenir le plus important. Celui-ci se passa en été, à Genève, il faisait beau. Nous devions passer toutes nos vacances en Suisse et nous n'en avons passé que la moitié. Mon père et ma mère se disputaient constamment. Le soir, alors que j'étais censée dormir, je me levais pour les écouter derrière leur porte. Le grand couloir en bois qui grinçait quand je marchais dessus et leur porte blanche qui semblait se refermer peu à peu sur mon bonheur. Ma soeur et moi avions décider de leur faire un joli dessin, j'avais pris une des mes plus belles feuilles rose et mon stylo argenté, ma sœur avait dessiné un grand cœur en écrivant à l'intérieur : "Odile + Jacques" les prénoms de mes parents. Fière de moi, je l'avais apporté à ma à ma mère. J'avais dû traverser le long couloir, prendre mon courage pour pousser la grande porte blanche. La chambre, que je ne connaissais que trop bien avec son papier peint rose et le couvre lit en rideau, ma mère, sur ce lit, pleurant toutes les larmes de son corps et mon père, insensible, devant son ordinateur, ne se souciant pas de la tristesse de sa femme. J'ai quand même apporté le beau dessin à ma mère mais il ne la rendit que plus triste. En prenant le dessin à deux mains, elle me dit : " C'est fini". Alors, comme si cette feuille représentait sa vie, l'union d'elle et de cet homme devant sa maudite machine, elle la déchira. Devant mes yeux d'enfant. Les deux morceaux tombèrent. Le temps s'arrêta, mais le papier continua sa chute. Je sus que c'était la fin de notre famille, qu'il nous abandonnait.

Aujourd'hui, je retourne encore dans cet endroit, mais le souvenir a disparu. Leur chambre a disparu, la porte a disparu. Il ne me reste juste le couloir et ma chambre. Leur chambre est devenue le salon et le salon, la chambre de mon père et de sa femme.

Je ne peux m'empêcher de me détester, je me déteste pas mon égoïsme. Le fait qu'aujourd'hui, je veux que mon père revienne, je veux que ma mère redevienne heureuse, que nous représentions encore une famille. J'ai pris la place de ma sœur, ou, devrais-je dire, la tristesse de ma sœur. Le soir, dans mon lit, je repense à notre vie, notre famille si heureuse, si belle dont je pouvais me vanter n'est plus là.